La Traversée de Charlevoix, avec une pré-ado!

 Janvier 2021

Après des mois de pause de montagnes américaines, je suis rendue au bout de ma patience que la frontière américaine n'ouvre.  Les Whites, ce sera pour 2022...  Misère.

Février 2021

Le Festival du film de montagne de Banff est maintenant offert en mode virtuel.  À défaut d'aller à mon activité annuelle de réseautage entre fans de plein air à Granby ou Sherbrooke, je visionne donc en famille les sélections de films d'aventure qui se sont démarqués au fameux festival.  S'en suit un désir encore plus grand de faire une activité intense en 2021.  C'est alors que je commence à procéder par élimination aux activités possibles en me posant les questions suivantes:

Où?  Quelque part au Québec

Quand? Juillet, quand l'ensoleillement est à son meilleur

Quoi? Randonnée en montagne.

Sentier de l'Estrie ? Non, trop de tronçons ne sont plus disponibles et la logistique pour gérer le tout ne m'enchante guère.

Sentier des caps de Charlevoix ? Pas assez long...  Ayant fait l'Acropole des draveurs avec les enfants l'an dernier (pour une énième fois), j'ai d'abord pensé à cette option dont le sentier d'une longueur de 51km prend quelques jours à faire.  C'est par hasard en regardant ce site que je tombe sur le site de la Traversée de Charlevoix qui propose un circuit totalisant 105km en 7 ou 6 jours.  

Un contact par courriel, un appel téléphonique plus tard et je réserve pour la longue traversée du 3 au 8 juillet, en refuge (le gros luxe) avec dépôt de nourriture à mi-chemin et même le transport de véhicule en prime à la sortie.  Habituée au camping sauvage et à la nourriture déshydratée en tout temps, je me gâte avec ces options supplémentaires.

Me voyant planifier le tout, la fille de mon chum, Ju, alors âgée de 11 ans, me questionne à savoir si elle pourrait faire une telle aventure...  Bien sûr, mais faudrait que tu t'entraines pour et connaissant sa condition physique et ses habiletés naturelles en montagne, je n'ai pas d'inquiétude.  Seul élément à considérer avant qu'elle n'embarque est l'équipement et la logistique à planifier.  On ne part pas seule comme on part à 2, donc je dois prévoir pour le pire et espérer le meilleur.


Préparation

Une fois la réservation faite pour le motel à la veille de la randonnée, la Traversée comme telle et un certain plan en tête, je commence la préparation technique.

Contrairement à mon habitude, je n'arrive pas à me procurer les cartes des sentiers à l'avance pour analyser le parcours et les sentiers.  Le site de la traversée contient des informations sommaires sur le dénivelé et une carte générale, sans plus.  Habituée à mes cartes hydrofuges des sentiers américains, j'avoue que ça me dérange un peu car j'aime bien faire des agrandissements papiers des sentiers, calculer et dessiner sur des copies de cartes donc plutôt déçue de ce côté.

Pour la logistique, on planifie les repas déshydratés pour la semaine avec extra: gruau, fruits déshydratés, noix, repas, soupes en sachets, repas en cannes et suppléments de glucides, rien n'est laissé au hasard.  Le but: ne pas manquer d'énergie durant la semaine, avoir plus que nécessaire en cas de pépin.  Comme on dit, on se prépare pour le pire et on espère le meilleur.  Ju est enthousiaste par le magasinage chez SAIL et au Bulk barn pour l'énergie. 

Autres éléments à prévoir, les assurances.  La Traversée propose de s'abonner pour 10 jours avec Airmédic, (services médicaux d'urgence aéroportés) au coût de 30$, forfait que l'on prend pour nous 2.  Un service d'urgence qu'on n'espère pas utiliser (quoique l'idée d'être secourue en hélicoptère plait assez à Ju...)  À 75$ pour 3 mois et 180$/an, si je recommence à faire des longues randonnées plus régulièrement, ce sera une option.

Pour les premiers soins, j'opte pour une trousse complète avec en extra, un bivy en aluminium pour l'hypothermie, des Benadryl, du chasse-moustique et de la lotion apaisante car les petites créatures ailées sont féroces en forêt en cette saison, des allumettes et quelques accessoires qui ne serviront pas.

Pour les ampoules, minimisant l'effort et contrairement à mon habitude, je n'ai pas amené mes bas "liner" en polypropylène...  erreur que je ne referai pas l'an prochain.  Ceci dit, une bonne coupe des ongles d'orteils, des bons bas en laine de mérinos changés régulièrement et de bonnes chaussures limitent les dégâts de ce côté, sans compter le fait qu'une fois la marche terminée, mes pieds seront "lousses" et bien aérés aux refuges.  Vive les gougounes.¸


LA Randonnée avec un grand R

Jour 1 - De l'Accueil à la Marmotte - 18,6km (19,23 selon mon décompte), 312m de dénivelés

La randonnée se fait en 6 ou 7 jours pour la totale ou 3-4 jours pour la demie-traversée.  Débutant à la Zec des martres près de St-Urbain, le premier refuge est à 4.2km de l'accueil.  Si vous partez un vendredi soir après le travail pour faire la demie-traversée durant un long weekend, je comprends qu'il peut être intéressant de prendre cette option, cependant, la petite marche en terre battue sur une route accessible en voiture prendra 1h de marche seulement donc on a bien fait de combiner les 4.2km de la première journée au 14km de la seconde.  

Le balisage des sentiers a entièrement été refait cette année et ce, avec des marqueurs kilométriques aux 0,5km faisant en sortes que c'est très facile de se retrouver dans le sentiers et motivant de voir les km diminués, car oui, c'est en mode compte à rebours que l'on avance dans le sentier.

En tout, c'est moins de 5h de marche, un total de 6h incluant les pauses que ça nous prend pour l'itinéraire.

On se fait proposer comme sentier additionnel d'aller sur le flanc du mont des Morios, cependant, nous avons notre journée dans le corps et l'envie de découvrir le refuge de la Marmotte et le Lac Boudreault à proximité est plus tentant par cette chaude journée...  Le lac regorge d'attachantes créatures au sens propre du terme ; on laisse tomber la baignade et c'est une toilette approximative dans un ruisseau près du refuge qui nous rafraichira. 



Jour 2 - De la Marmotte à la Chouette - 17,8km, 780m de dénivelés

Encore une fois, pour la 2e journée, on a des options d'itinéraires plus ou moins long.  Si on veut prendre le chemin le plus court, près du km 11 du compte à rebours, une piste de 2km mène rapidement au 3e km, ce qui coupe de 17,8 à environ 10km pour la journée.  Cependant, ce raccourci nous prive aussi de l'une des plus belles vues de toute la traversée, soit le sommet de la Noyée qui était l'un des sommets du défi des 5 sommets en 2020.  Motivées par la vue et le défi, on débute la journée aux aurores (dès 6h, après le gruau, on est déjà en route) et on ne sera pas déçues.  C'est magnifique, la météo est parfaite avec une température avoisinant les 15° et l'air est bon. Plus de montées que de descentes, mais pas trop technique, le sentier est très bien aménagé et on prend une longue pause au sommet. 

Le point de vue du refuge de la chouette est magnifique avec un lac aux reflets cristallins turquoises à nos pieds.  Pas de sangsues cette fois-ci et bien que le lac n'est pas génial pour la baignade vue la grand quantité de vase, c'est quand même bienvenu à la fin de cette journée parfaite.

Ça nous prendra encore moins de 5h pour notre marche et un total de moins de 6h30 incluant les pauses.

Jour 3 - De la Chouette au Geai bleu - 14,1 km, 253m de dénivelés, avec le raccourci - (sentier régulier 19,6km 587m de dénivelés)

La 3e journée nous mène au Parc des Hautes-Gorges de la Rivière-Malbaie.  Avec un mercure de près de 30° et une option de raccourci possible, je décide que l'on coupera une grande portion de la journée, soit environ 5 kms en prenant le sentier de vélo de montagne au 2e km de notre journée.  Sage décision car la chaleur et l'humidité seront telles qu'on est vraiment contente d'arriver à 9h à la navette du Parc.  Cette navette, ou autobus jaune, est en opération tout l'été et sillonne le parc avec des arrêts aux 10-15 min.  Ça amène les gens de l'accueil du parc aux différents campings, au fameux sentier de l'Acropole et au barrage du Parc ou se trouve un centre de services.  C'est là que je décide d'aller et on se gâte avec une salade de pâtes et des crudités (rares en randonnée) ainsi qu'un billet pour le bateau-mouche qui navigue sur la rivière.  Une belle pause, relaxe et quand on reprend la navette pour retourner sur nos pas, il ne nous restera que quelques kms à faire pour nous rendre au refuge du Geai Bleu, de loin le plus luxueux avec son poêle au propane, ses prises solaires de recharges USB et sa vue époustouflante sur la rivière Malbaie.  On se baigne, on se dore au soleil et avec mon option de luxe de dépôt de nourriture, on mange une lasagne au four et des œufs bacons pour le lendemain matin.  Le plus beau moment de notre séjour sans contredit.

Avec une journée comprenant plus de descentes que de montées encore une fois et le raccourci, on marche environ 3:45 sur une journée de 7h30 avec les pauses et le bateau-mouche.

Jour 4 - Du Geai bleu au Coyote - 15,7km, 560m de dénivelés

Après avoir eu une journée chaude la veille, cette journée sera humide de surcroît, faisant en sortes que les créatures ailées voraces ne nous lâcheront pas de la journée : mouches noires, moustiques, mouches à chevreuils, elles se sont toutes passé le mot pour nous attaquer sans relâche.  Le chasse-moustique appliqué aux heures ne suffit pas et c'est avec un filet sur la tête que nous arrivons à supporter leur présence.  C'est difficile mentalement après la journée de la veille et c'est aussi dur physiquement en raison du fort dénivelé et de la technicité du sentier.  

On quitte le Parc des Hautes-Gorges pour entrer dans la Zec du Lac-au-sable et on voit plusieurs caches pour la chasse durant cette journée.  On marche moins de 5h sur un total de 6h incluant les pauses, mais les insectes et la moiteur ont été durs sur notre moral.  En fin de journée, une fois rendues au refuge et après le repas, on retrouve un certain entrain et on a hâte au lendemain.

Jour 5 - Du Coyote à l'Épervier - 20,6km, 454m de dénivelés

Le jour 5 marque le début de la fin comme on dit et surtout, on reprend bien vite le sentier transcanadien.  C'est sans contredit le footing le plus intéressant de la traversée et la quiétude des sentiers peu fréquentés est particulièrement apaisante.  Après notre lever aux aurores comme d'habitude, une fine bruine, des températures plus fraîches et un ciel gris seront de la partie pour nous donner la parfaite journée de randonnée qui sera aussi la plus longue.  On fait le parcours en un peu moins de 6h, 7h incluant les pauses et c'est vraiment passé comme un éclair tant les changements de décors nous ont absorbés.

On est parti avant 6h du refuge et Ju me pose une drôle de question après 12 km : "yé quelle heure?".  Ce à quoi je réponds: "pourquoi tu veux savoir?  Ici, l'heure, ce n'est pas important.  Si tu te demandes si c'est l'heure de diner, c'est parce que c'est l'heure de diner.  Point."

Conseil de randonnée: on mange quand on a faim, on se repose quand on a besoin et on arrête si on a envie. En groupe par ailleurs, il est sage pour le guide de forcer les pauses du groupe et inciter les gens à arrêter à des moments décidés par le guide, question de respecter une certaine cadence et permettre aux différents participants d'y aller à leur rythme, cependant, à deux, avec toute une journée pour aller du point A au point B, on se fout des périodes ou kms qui nous séparent des arrêts ou points de vue.  On arrête quand il le faut et c'est tout, même si ça implique qu'on lunche à 9h30.

Une amie a décidé de nous rejoindre au dernier refuge pour faire la dernière journée avec nous.  Surprise: elle nous a amené des fraises et on les a mangé en quelques minutes, trop contentes d'avoir de si bons fruits frais.  On en profite pour chauffer 2 plats déshydratés séparés en 3 parts égales et puisque l'on sait que la journée du lendemain est la dernière, on prend le temps de se raconter des anecdotes et de discuter avec les 3 autres randonneurs qui ont entrepris la longue traversée avec nous.  On s'est peu vu sur les sentiers puisque nous étions les matinales du groupe, mais c'était toujours intéressant d'échanger en fin de journée sur nos moments forts de la journée.  2 étudiants en maîtrise ont fait plus que la traversée et se rendent jusqu'à St-Siméon à pieds ; une autre randonneuse le fait en autonomie en dormant dans son hamac de camping.  Discussions animées sur les expériences de trek de chacun, les hauts et les bas, les meilleurs équipements, tout y passe.  J'ai adoré ces gens rencontrés durant le trajet.

Jour 6 - De l'Épervier à l'arrivée au Mont Grand-Fonds - 10,3 km, 296m de dénivelés

Notre dernière journée s'avère assez relax.  Le dénivelé est assez faible et ça nous prendra moins de 3h pour franchir les derniers 10 kms qui nous amène au stationnement du Mont Grand-Fonds où ma voiture nous attend grâce au service de transport de véhicule.  

Nos 2 compagnons de voyage prennent le sentier transcanadien pour St-Siméon ; notre nouvelle amie randonneuse et nous prenons le sentier qui mène à la station de ski et qui emprunte des sentiers qui sont aussi utilisés lors du défi de l'ultra trail Harricana qui se tient en septembre de chaque année.  En fait, pas mal toute la traversée se fait sur les mêmes sentiers que pour l'Ultra trail, mais c'est seulement au jour 6 qu'on voit les balises du loup de l'événement.

Je savais en faisant ce défi que ce serait un défi pour Ju et moi et je sais que ça restera marqué dans nos mémoires pour longtemps.  J'ai eu la chance à son âge de découvrir la randonnée et les treks dans le Parc de la Gaspésie et je suis surtout contente de lui partager ma passion.  C'est le sourire aux lèvres avec une jeune fille qui dormira pendant pratiquement tout le trajet du retour que je rentre chez moi, à penser à mon prochain défi du genre.  La Long trail est toujours un projet, mis de côté en raison du COVID, mais ce challenge m'interpelle tout particulièrement.  À suivre.



  




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