Savoir s'adapter pour les clients

Avec le COVID, je n'ai pas écrit depuis plus de 6 mois: c'est sûr que quand ton blog s'intitule "survie voyage" et que tu ne voyages plus nul part, jamais, ça tue le rêve.

Qu'à cela ne tienne, j'ai lu beaucoup dans les derniers mois comme beaucoup de gens et en tant que fière "prosumer" ou prosommateur* en français, j'ai vu avec tristesse des commerces durement frappés tomber au combat et d'autres qui ont connu un bel essor inattendu ces derniers mois.

Dans les médias, on entend souvent que l'adoption numérique explique le succès des gagnants de la COVID.  Au delà de l'expérience numérique cependant, je crois que les gagnants du COVID doivent leur succès à la gestion du client et à leur capacité de s'adapter et de sortir des sentiers battus dans certains cas pour demeurer en opération.  Les compagnies qui mesurent le succès non pas sur ce qu'elles offrent au marché mais plutôt sur en quoi ils servent les clients se démarquent (je suis contaminée par la philosophie de Outside-In qui tinte désormais mes propos tant dans la sphère personnelle que dans mon approche professionnelle.

* Le prosommateur est le consommateur impliqué dans l'expérience d'achat, soit la génération après le consommateur ; c'est un acteur qui participe à la production de ce qu'il consomme.  





Épicerie en ligne 

J'avais commencé à faire mon épicerie en ligne en 2019 après mon invalidité de 3e trimestre de grossesse où j'étais totalement dépendante des autres.  Livraison pour les médicaments, épicerie à emporter et achats 100% en ligne sont devenus ma nouvelle réalité.  Le service était peu utilisé et j'avais l'impression de faire partie des clients qui avaient un impact sur le développement de l'expérience.  Après tout, ce service était nouveau pour les commerçants.  Après en avoir tester plusieurs (épiceries), j'ai développé ma relation de confiance avec Provigo Magog et je fait rarement l'épicerie dans les allers désormais.

Avec le COVID, c'est devenu un service plus largement déployé mais avec une efficacité et un succès non équivalent entre chacun ; même pour une même bannière, le service varie d'une ville à l'autre selon un sondage non exhaustif entre amis.

Au début par contre, les épiceries n'étaient clairement pas prêtes à tant de demande en ligne et j'ai vu mon service perdre des plumes en ayant des délais allant jusqu'à 1 semaine pour pouvoir commander.  Après un réaménagement du service, plus d'espace de stationnement pour satisfaire la demande (le concept est de commander en ligne mais de devoir récupérer la commande à l'auto puisque la livraison n'est pas disponible dans ma région...  C'est ça quand on est en zone rurale).  

On a encore beaucoup de retard au Québec sur l'épicerie en ligne et la livraison ; on est déçu que les clients se tournent vers les grandes bannières (Walmart, Amazon Fresh) au détriment du local mais on devrait quand même se poser la question en 3 temps: 

1- doit-on réinventer la roue ou peut-on s'inspirer de modèles qui fonctionnent ailleurs (en Europe, en Asie), sur les services de livraison, incluant les épiceries.  En Corée, on peut acheter en attendant le métro et se faire livrer à la maison.

2- when you can't beat them, join them... alors peut-on utiliser les technologies des gros joueurs ou avoir des ententes avec eux pour pallier nos retards?

3- et le consommateur dans tout ça ?  il veut quoi?  pourquoi penche-t-il vers le modèle des grandes bannières?  Le coût n'est pas la seule raison.  Le shift se fait de consommateur en prosommateur.  Peut-on mieux comprendre les besoins des clients pour y répondre ?  Je ne parle pas ici de développer un modèle "one fits all", mais de revoir les clients par persona et non selon les catégories traditionnelles classiques pour cibler comment on adresse les besoins desdits clients. 


Le concept important de base à comprendre ici est que dans notre offre de service, on doit faire la distinction entre "traiter tous les clients également" et "traiter tous les clients équitablement".  Le client, en l'occurrence, le client qui comme moi, compare, magasine tant en vrai qu'en ligne, qui peut s'acheter de la nourriture comme des vêtements, des voyages comme des technos, il compare, consulte des forums en ligne, lie les commentaires des autres, s'informe...  Quand il magasine en ligne, il ne compare pas que l'expérience d'achat en ligne du magasin de sport #1 avec l'expérience du magasin de sport #2 ; il a des coups de cœur d'expérience et des expériences à éviter.  Pourquoi alors quand on se compare comme entreprise, le fait-on toujours avec "des industries similaires, de tailles similaires, d'offres similaires" et ne se compare-t-on pas plutôt aux expériences des clients?


Quelques expériences vécues et les leçons à tirer:

- Commander un produit en ligne mais se rendre compte rendu au panier que l'article n'est disponible qu'en magasin...  si vous vendez en ligne, assurez-vous que l'inventaire disponible suit l'offre en ligne et que les filtres appropriés soient disponibles au consommateur.  Autrement, mettez un filtre qui permet aux consommateurs de ne voir que les produits en ligne.  (Si vous ne voyez pas ce dont je parle, explorez les rabais sur SAIL.ca, 10 filtres possibles, mais il faut une bonne dose de patience pour trouver les articles qu'on choisit.)  Je veux bien encourager cette bannière et je suis fidèle à la compagnie depuis ses premiers soubresauts à Beloeil, cependant, c'est dommage que le site web ne s'adapte pas aux réalités de 2021.  En fait le problème est que les produits vendus en ligne sont expédiés d'un entrepôt ou d'un magasin X alors que les commandes récupérées au magasin viennent du magasin en question.  Ainsi, si un client magasine et qu'il a des produits disponibles et non disponibles en ligne, il n'a d'autres choix que de se déplacer en magasin ou d'abandonner des articles du panier virtuel.  Belle perte de temps et beau gâchis d'expérience client.

Un compétiteur direct, MEC, a compris le concept ; si l'article n'est pas disponible au magasin #1 pour la livraison, ils considèrent tous les magasins comme des entrepôts desquels les produits peuvent être livrés pour une commande X du client.  J'ai ainsi reçu 3 colis pour une même commande avec des produits venant d'un magasin du Québec, un de l'Ontario et un des BC.


- Prenons un autre cas fort simple d'un complexe hôtelier de ma région, l'Estrimont.

Dès le début du confinement, ils se sont mis à développer un concept de boîte repas "comme au resto" en offrant même un accord mets-vins pour couronner le tout.   Le concept est que les plats sont prêts pour la plupart avec un minimum de cuisson au four, au micro-ondes ou au BBQ.  Moins taxant en temps que les boîtes repas comme GoodFood ou MissFresh, l'expérience se veut d'en être une plus prêt du restaurant chez soi.  À défaut d'avoir des clients en salle et dans l'hôtel, le but était bien sûr de maintenir les activités et de pouvoir rentabiliser les installations.  L'autre effet non négligeable de ce service offert localement pour les gens de la région a permis aux consommateurs de découvrir ce resto et a permis aussi au restaurateur de mesurer la popularité de ses plats.  J'ai vu sur les réseaux sociaux des offres ciblées et des ajustements à la semaine des plats et bien que l'on soit maintenant en zone orange avec réouverture de l'hôtel, la boîte repas est encore un service disponible avec une carte-cadeau de 100$ offerte pour chaque boîte de 50-70$/2 personnes.  Belle façon de fidéliser en plus la clientèle.  Les consommateurs frileux à retourner en salle à manger tant que les mesures de distanciation se poursuivront ont une chance de poursuivre l'expérience et le restaurateur qui a une salle à manger à capacité restreinte en profite.  C'est win-win.


Et les enjeux de livraison avec Postes Canada

Un autre bel exemple d'adaptation: récemment, la Facture faisait un reportage sur les enjeux de Postes Canada depuis le COVID qui n'ont plus à faire signer les clients et où les colis sont parfois volés sur les perrons des consommateurs.  Vrai enjeu, triste autant pour le client que le commerçant. 

Certains ont migrés vers des services alternatifs (plus chers) comme Fedex et UPS, d'autres ont carrément décidé de faire leur "run de lait" eux-mêmes.  

J'ai ainsi eu la surprise de me faire livrer une cire à ski de fond et des lacets par un livreur en voiture de luxe (possiblement le proprio de la boutique du Coureur de Sherbrooke).  D'autres, comme la Savonnerie des Diligences, offrent de venir récupérer la commande à l'usine de fabrication directement.  Dans les 2 cas, l'adaptation du commerçant en mode action est un bel exemple de cas win-win.  (Et pour les savons, je ne savais même pas que l'usine avait déménagé et grandit, belle fierté locale).


Les limites des persona et de l'expérience client  

Ne pas oublier dans tous ses concepts 2 notions de base pour revoir le service client et l'expérience client.

Persona

Un même client peu avoir plusieurs persona, et ce, même pour un même service.  Je ne m'attends pas à recevoir le café que je vais me chercher chez Tim un lundi matin 7h30 quand il y a une longue file d'attente au service de la même façon que si je vais m'en chercher un le dimanche après-midi d'été.  De un, j'ai le chapeau efficace go-go-go le lundi matin et je suis en mode expéditif (ainsi que la personne au Tim) alors que je serai en mode easy-going relax le dimanche après-midi.  Même commerce, même client, attente de service différente.

Le service à travers les expériences client

Pour reprendre le même concept que dans l'exemple du café, je peux, selon les circonstances, tester différentes expériences client pour un même commerces.  Prenons le cas d'une boutique bien connue de jeux de société de Sherbrooke.  J'ai expérimenté l'achat en ligne avec récupération en magasin pour mes cadeaux de Noël, l'achat en magasin avec service conseil pour un achat à un conjoint qui connait tous les jeux et que je voulais surprendre (défi en soi) et l'achat de type flânage de création de besoins (vous savez, quand on n'a rien en tête mais qu'on veut seulement avoir le feeling d'acheter).  Je suis toujours la même personne avec des besoins ludiques, mais avec une mission différente dans les 3 cas.  La seule attente comme consommatrice ici: avoir la même qualité de service à travers les 3 expériences.  Le concept est simple mais l'opérationnalisation de la solution l'est moins.  Comment offrir le même service attendu à travers les plateformes numériques et en "présentiel" ?  Offrir le conseiller en ligne? (Danger ici envers les mauvais "bot" qui donnent des réponses automatiques de base)  Revoir le site web pour que celui-ci soit plus intuitif?  Tant de temps et d'effort à mettre en stratégie numérique qui peuvent sembler un fardeau pour le commerçant.  

Certains y arrivent ; d'autres y peinent, mais apprenons de nos expériences de consommateurs pour changer nos façons de traiter nos clients.




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